Simplifier le régime obligatoire des retraites, voilà l’idée générale de la réforme. Et ce, en regroupant les 42 régimes existants aujourd’hui en un seul et même régime universel d’ici à 2025. Elle concernera uniquement les personnes nées après 1963 — tous ceux qui sont nés avant cette date ou déjà à la retraite ne seront pas touchés. Le principe d’un régime par répartition demeure, mais il se fera uniquement par points et non plus sur le nombre de trimestres acquis : vos cotisations retraite (et celle de votre employeur si vous êtes salarié) seront converties en points (à la valeur évolutive) que vous cumulerez donc tout au long de votre carrière (c’est déjà le cas pour certains régimes, notamment pour la retraite complémentaire des salariés du secteur privé). Le montant brut annuel de la retraite est calculé en fonction de la valeur du point au moment du départ à la retraite.
Un taux de cotisation «unique»
La réforme ne changera normalement pas non plus l’âge légal de départ à la retraite, à savoir 62 ans. En revanche, elle prévoit un âge pivot dit «de taux plein», avec un système de décote-surcote autour de 64 ans, en fonction de l’âge effectif auquel vous partirez à la retraite. Par exemple, un salarié qui souhaiterait liquider ses droits à la retraite dès ses 62 ans et qui ne «bénéficierait» ni d’une carrière longue ni du dispositif pénibilité verrait le montant de sa retraite diminuer de 10 %. À l’inverse, en cas de départ à la retraite à 65 ans, le montant de la retraite serait revalorisé de 5 %.
Cette réforme prévoit d’autres nouveautés, par exemple la majoration dès le premier enfant ou un taux de cotisation «unique», que vous soyez (1) travailleur salarié ou non . Et c’est là que votre attention doit se porter. En effet, ce taux de cotisation «unique» dépend toutefois de votre salaire ou rémunération. Pour un salaire inférieur à trois fois le plafond annuel de la Sécurité sociale, soit environ 120 000 euros par an, il n’y aura guère de changement. En revanche, pour les salaire supérieurs, une partie de la rémunération ne donnera pas de droit à la retraite. Du coup, vous cotiserez moins, mais vous aurez aussi moins.
À titre d’exemple, un salarié touchant 175 000 euros par an cotise aujourd’hui 47 623 euros, dont 43 598 euros donnant des droits à la retraite. Avec la réforme, ce même salarié cotisera 35 687 euros, mais seulement 30 769 euros de ces cotisations lui ouvriront des droits. Pour les travailleurs non salariés, même combat… en pire.
Bref, si vous n’y avez pas déjà pensé, il est plus que nécessaire de trouver des solutions de retraite complémentaire.
Les solutions d’épargne retraite
Il existe de multiples façons de se constituer une retraite complémentaire. Certains choisiront l’immobilier, d’autres l’assurance vie (lire aussi AMMag de septembre 2019, p. 58) et le meilleur conseil qu’on puisse donner est de diversifier. Pour ce faire, vous avez à disposition des solutions permettant de se constituer un complément de retraite en bénéficiant d’un avantage fiscal. Il s’agit notamment du Perco (plan d’épargne retraite collectif mis en place par l’entreprise pour ses salariés), de l’article 83, des contrats Madelin ou du Perp (plan d’épargne retraite populaire). Certains de ces contrats offrent la possibilité de déduire de son revenu imposable tout ou partie de ses versements, dans le cadre d’une limite propre à chacun. Pour autant, si chaque avantage fiscal est autonome vis-à-vis des autres, le cumul des déductions possibles est encadré et plafonné. Ce plafonnement global a été mis en place à la création du Perp en 2003.
Avec le Perp, l’objectif est d’offrir à chacun la possibilité de se constituer une épargne retraite complémentaire individuelle encouragée par une déduction fiscale. Or, le législateur ne souhaitait pas avantager les contribuables qui avaient déjà accès aux dispositifs comme le Perco, l’article 83 et le contrat Madelin. Ainsi, pour le contribuable souhaitant se constituer une retraite complémentaire facultative, le législateur a mis en place un système de globalisation des plafonds de déduction ; ce système a pour vocation d’assurer l’équité entre les contribuables.
Il est souvent reproché à ces solutions, en particulier aux Perp et aux Madelin, certains inconvénients :
- Ces produits étant des solutions de retraite, on ne peut sortir de façon anticipée, donc avant le départ à la retraite, que dans des cas très limités, tels que surendettement, décès du conjoint, invalidité ;
- Lors du départ à la retraite, l’épargne est versée sous forme de rente viagère — si vous avez besoin du capital, seulement 20 % de l’épargne peuvent être libérés, mais pas davantage (sauf achat d’une résidence principale) ;
- Un engagement minimal de versement annuel est exigé pour les contrats Madelin, en vue de conserver les avantages fiscaux — sous peine de rattrapage par le fisc des avantages fiscaux acquis.
Le plan d’épargne retraite les remplacera tous
En fait, ces contrats d’assurance sont souvent souscrits dans une logique d’optimisation fiscale plutôt que d’épargne. Mais, depuis le 22 mai 2019, la loi relative à la croissance et à la transformation des entreprises, dite loi Pacte, a annoncé un produit unique dédié à la retraite : le plan épargne retraite (PER) est disponible depuis le 1er octobre 2019. Celui-ci remplacera à terme (au plus tard le 1er octobre 2020) les produits retraite de type Madelin, Perp, article 83, Perco… Le plan épargne retraite peut être ouvert sous la forme d’un contrat d’assurance dont les prestations seront liées à la cessation d’activité professionnelle. Plus souple, il permet à l’épargnant beaucoup de possibilités de sortie à l’échéance, notamment en capital.
De surcroît, les fonds de l’ensemble des contrats souscrits antérieurement, de type Perp ou Madelin, peuvent être transférés sur le contrat PER à tout moment. L’inverse est totalement impossible puisque les autres contrats ne pourront plus être souscrits à partir d’octobre 2020. Et un PER pourra être transféré sur un autre PER, par exemple lors d’un changement d’employeur.
Les entreprises sont elles aussi concernées, car ce sera le même contrat PER qui pourra se substituer aux contrats collectifs de type Perco ou article 83. À noter que la gestion en sera facilitée, tant pour l’entreprise souscriptrice que pour le salarié épargnant.
Daniel Azarian (Ai. 199)
(1) Travailleur non salarié (TNS) : indépendant, gérant majoritaire, etc.