Protection juridique, un contrat méconnu

La souscription d’un contrat d’assurance en responsabilité civile, souvent appelé RC pro (1), est un réflexe chez la plupart des dirigeants d’entreprise. En revanche, la souscription d’un contrat de protection juridique professionnelle est loin d’être un automatisme. Et pourtant...

Seulement 20 % des entreprises sont équipées d’un contrat de protection juridique professionnelle. Et cela pour deux raisons principales : nombre de chefs d’entreprise pensent pouvoir autofinancer leurs litiges et ils méconnaissent les garanties proposées par les contrats de protection juridique. L’assurance protection juridique est définie comme «toute opération visant à défendre, représenter en demande l’assuré ou contre une réclamation dont il fait l’objet». Cela signifie qu’une assurance protection juridique accompagne et défend l’assuré en cas de litige, qu’il en soit à l’origine ou qu’il le subisse. Sachant que le nombre de litiges a progressé de 73 % entre 2008 et 2013, ce type d’assurance devient indispensable.

Quand la responsabilité civile n’est pas engagée

La première méprise des chefs d’entreprise réside dans leur croyance que leur contrat RC pro les couvre en pareil cas. C’est en partie vrai, car, en cas de recherche en responsabilité civile de l’entreprise, c’est la garantie défense-recours, accessoire à la RC, qui engage l’assureur à prendre en charge tout ou partie des frais de défense (avocats, experts, frais de procédure, etc.) ou des recours juridiques lorsque la responsabilité est partagée ou transférée à une autre partie.

Par exemple, un architecte, contractant général, orchestre des travaux de rénovation chez M. Pasdebol. Il fait appel à un plombier qui refait mal l’évacuation des eaux usées qui refoulent. M. Pasdebol n’a pas contractualisé avec le plombier mais avec le contractant général. C’est donc lui, l’architecte, qu’il met en cause et la garantie défense-recours du contractant va s’activer pour, d’une part, le défendre mais aussi, d’autre part, faire un recours juridique contre le plombier pour que ce dernier prenne en charge l’indemnisation des dommages et intérêts.

Oui, mais voilà… la garantie défense-recours ne peut être dissociée de la notion de responsabilité civile. Or tous les litiges ne relèvent pas de la seule responsabilité civile de l’entreprise. Un litige avec un voisin de la zone industrielle, avec l’urbanisme lors de la construction d’une extension de l’usine, avec l’administration fiscale, avec un salarié qui saisit les prud’hommes, etc. : autant de cas de figure que la garantie défense-recours ne prendra jamais en charge. En revanche, ils le seront par un contrat de protection juridique professionnelle.

Les garanties usuelles proposées

La première prestation qu’offre un contrat de protection juridique est celle de l’information. Les compagnies proposant ce type de contrat disposent ou font appel à des juristes spécialisés qui répondent aux questions diverses et variées des souscripteurs. Généralement, cette information juridique s’obtient en téléphonant à un numéro dédié.

Lorsque l’information juridique ne suffit pas à prévenir le litige, le service protection juridique de l’assureur accompagne l’assuré dans ses démarches et sa défense en vue de résoudre le litige à l’amiable, ce qui est l’issue, en moyenne, de 70 % des litiges amenés aux assureurs.

Lorsque le litige ne peut être résolu à l’amiable et qu’une procédure judiciaire est ouverte, le service protection juridique de l’assureur continue en général à accompagner l’assuré et prend en charge les frais, dépenses et honoraires découlant de la procédure. Évidemment, l’assureur établit un plafond pour ces frais et honoraires, qu’il ajuste en fonction de la demande de ses clients. Généralement, l’assureur laisse le choix de l’avocat à l’assuré mais peut lui en suggérer un s’il n’en connaît pas. Enfin, l’assureur veille à l’application de l’accord négocié à l’amiable ou de la décision judiciaire obtenue et prend en charge les frais nécessaires à cela.

Les options complémentaires

Les sujets qui peuvent concerner la protection juridique professionnelle sont très vastes (lire l’encadré ci-contre). Des options peuvent être souscrites en complément, comme la protection juridique fiscale qui permet l’accompagnement, et la prise en charge des frais, par un expert-comptable ou un avocat fiscaliste en cas de contrôle fiscal ou de l’Urssaf, ou encore le recouvrement des créances professionnelles.

Certaines activités spécifiques peuvent également faire l’objet de prestations dédiées. On peut notamment citer les transporteurs qui sont confrontés à des risques accrus de litiges liés à la circulation routière des conducteurs de l’entreprise : infraction au code de la route, accident, licenciement d’un salarié suite à la perte de son permis de conduire, stage de récupération de points, etc.

Enfin, les assureurs sont à même de monter des solutions sur mesure pour les grandes entreprises, les comités d’entreprise, les réseaux de franchise, les clubs et associations, les réseaux professionnels tels que syndicats ou ordres, etc., avec des prestations adaptées aux spécificités de chacun.

Daniel Azarian (Ai. 199)

Les crises les plus communes

Un contrat de protection juridique pro est utile dans beaucoup de situations. Les plus fréquentes sont :

Les litiges avec les fournisseurs, les concurrents, les administrations. Par exemple, un fournisseur n’a pas livré la commande à temps, et cela entraîne une baisse des ventes ; la mairie prend un arrêté de fermeture des commerces que le professionnel conteste ;

La défense de dirigeants mis en cause personnellement ;

La prévention et la gestion des conflits avec les salariés mais aussi la défense pénale de salariés poursuivis pour des faits liés à l’exercice de leur fonction ;

L’assistance à la communication de crise ou à l’e-réputation. En effet, certains assureurs font accompagner leurs assurés par un consultant spécialisé ou prennent en charge un «web nettoyage». Par exemple, un client mécontent poste des propos diffamatoires sur les réseaux sociaux, un défaut de fabrication d’un produit entraîne la mort d’un client — autant de cas qui mettent en péril la réputation et la stabilité de l’entreprise.

(1) Lire aussi AMMag de mai 2019, p. 48.