Ce qu’il faut savoir sur la responsabilité civile

En tant que chef d’entreprise, votre couverture en responsabilité civile, c’est l’assurance vie de votre société. Elle vaut la peine que vous preniez le temps, avec votre assureur, de bien tenir compte de tous les paramètres de votre activité avant de souscrire.

Tout au long de la vie de l’entreprise, de sa création à sa transmission, cette dernière peut causer des dommages à des tiers, personnes physiques ou morales, clients, fournisseurs, administration. Elle peut donc être jugée responsable des dommages et devoir verser des indemnités, parfois très importantes, susceptibles de la mettre en péril. Pour se protéger, l’entreprise a à sa disposition l’assurance en responsabilité civile (RC). On distingue au moins trois types d’assurance en RC, ayant souvent des montants de garanties spécifiques.

La RC exploitation

Appelée également RC «pot de fleurs» (celui qui tombe sur la tête d’un client), elle protège la société contre une mise en cause au titre de l’exploitation de son entreprise, c’est-à-dire lorsque le dommage n’a rien à voir avec l’activité exercée dans l’entreprise.

Exemple : un client vient visiter les locaux de l’entreprise, se prend les pieds dans un carton posé dans l’atelier et se blesse en tombant. C’est la garantie responsabilité civile exploitation de l’entreprise qui indemnisera le client blessé.

Cette garantie couvre également la «faute inexcusable de l’employeur», c’est-à-dire les dommages causés par le non-respect de son obligation eu égard à la sécurité de ses salariés.

Exemple : un ouvrier travaille sur un toit et oublie de fixer son harnais ; il tombe et décède. La responsabilité de l’employeur au titre de la faute inexcusable peut être engagée et la garantie responsabilité civile exploitation être actionnée.

La RC après livraison

Cette garantie, qui regroupe la RC pro et la RC produit, permet de couvrir les dommages résultant de l’activité propre de l’entreprise. La RC pro concerne les prestations de conseils ou de service ; et la RC produit les risques liés à la vente de produits.

Exemple 1 : une société de maintenance informatique, lors d’un changement de disque dur pour laquelle elle a été missionnée, perd les données comptables de son client que le disque contenait. Son client la poursuit en mettant en cause sa responsabilité civile professionnelle.

Exemple 2 : plusieurs lots de fromages fabriqués par un industriel de l’agroalimentaire sont contaminés par une bactérie et doivent être retirés au plus vite du marché. Les frais de rappel et les préjudices subis par les clients de l’industriel sont pris en charge pas l’assurance RC produit.

RC décennale et RCMS

Pour la responsabilité civile décennale qui concerne les professionnels du BTP et la responsabilité civile du mandataire social (RCMS), reportez-vous aux articles parus dans AMMag de novembre 2018, p. 58, et de septembre 2018, p. 64.

Des offres de type forfait

Si vous fournissez des prestations de services (maintenance) sur les produits que vous fabriquez et vendez, vous pouvez avoir à souscrire une garantie en responsabilité civile (RC) exploitation, plus deux autres, en RC pro et en RC produit. Sachez cependant que la plupart des assureurs proposent des RC générales, sortes de «packages» (forfaits) qui couvrent l’ensemble de ces aspects, mais jetez quand même un coup d’œil à votre contrat pour être sûr que vous disposez des bonnes garanties, notamment la RC exploitation qui fait parfois défaut dans ce type d’offre.

Identification de l'activité

L’assureur doit veiller à identifier les activités de votre entreprise car cette étude préalable va définir les risques en responsabilité civile et, donc, le montant de la cotisation. Par exemple, vendre les produits que vous fabriquez sur Internet n’expose pas la responsabilité de l’entreprise de la même façon que lorsque les produits sont vendus en boutique. Vérifiez donc que les activités déclarées sur votre contrat d’assurance correspondent bien à celles que vous réalisez. À défaut, en cas de sinistre, vous risquez tout simplement de ne pas être couvert. Les paramètres de l’activité (chiffre d’affaires, effectif, proportion de sous-traitance, pays où vous exportez, activité des clients chez qui vous intervenez, etc.) sont des éléments clés dans le calcul de la cotisation d’assurance. Toute modification de ces paramètres doit être signalée sous quinze jours à l’assureur pour réévaluation du risque ; et c’est à l’assuré que revient l’obligation légale de prévenir son assureur !

Attention notamment aux pays avec lesquels vous travaillez. Typiquement, exporter aux États-Unis ou au Canada engendre des contraintes qui doivent être spécifiquement étudiées et qui font en général l’objet d’une ligne de garantie spécifique.

Votre assureur doit également vous interroger sur les secteurs d’activité des clients chez qui vous intervenez… Industrie aéronautique, automobile, nucléaire, pharmaceutique sont autant de secteurs qui influent sur les risques RC que vous courez et dont votre assureur doit absolument tenir compte pour trouver une solution pertinente.

Vous avez dit DINC ?

Une attention toute particulière doit être apportée aux dommages immatériels non consécutifs (DINC). C’est l’un des points essentiels du volet RC d’un contrat d’assurance. Il est souvent zappé dans l’étude des besoins alors qu’une mauvaise estimation de ces derniers peut être catastrophique.

Pour faire simple, un dommage immatériel est une perte financière ; le fait qu’il soit non consécutif signifie qu’il ne découle pas d’un dommage matériel ou corporel.

Exemple 1 : un fabricant de joints d’étanchéité pour méthanier livre un armateur. Sur l’un des navires équipés de ces joints, ces derniers ont un défaut et des fuites sont observées. Le bateau est immobilisé au port du Havre pendant dix jours. Le coût de l’immobilisation pour l’armateur est de 150 000 € par jour, soit 1 500 000 € pour toute la période d’immobilisation. L’armateur se retourne contre le fabricant pour réclamer cette somme au titre d’un dommage immatériel non consécutif (le défaut de fabrication du joint n’est pas un dommage garanti).

Bien souvent, la couverture des DINC est relativement limitée : entre 200 000 € et 700 000 € pour des contrats dits «standards», montant bien insuffisant dans le cas de notre fabricant de joints.

Exemple 2 : un cabinet de chasseurs de têtes recrute un candidat et ne vérifie pas les certifications professionnelles nécessaires au poste et que ce dernier prétend avoir. Quelques mois après son embauche, le client s’aperçoit que le candidat a menti : il ne dispose pas de ces certifications et il est licencié. Les frais engagés par le client pour retrouver un candidat dans l’urgence peuvent être considérés comme des dommages immatériels non consécutifs.

Il est donc essentiel de vérifier que la couverture présente dans votre contrat au titre des DINC est suffisante. Il vous faut par conséquent vous poser la question de l’impact financier maximal que pourrait subir l’un de vos clients si vous n’exécutez pas la prestation correctement ou si votre produit présente un défaut.

Daniel Azarian (Ai. 199)